L’association Communication Pacifique fête ses dix ans cette année.
Elle s’est créée avec l’envie, l’élan, le rêve que toute la Nouvelle-Calédonie puisse avoir accès à une nouvelle forme de communication pour améliorer la qualité des relations familiales, amicales et professionnelles.
Petit à petit, l’association a connu la communication NonViolente, en 2015, et depuis, elle s’attache à faire intervenir des formateurs certifiés en Communication NonViolente venant d’Europe ou encore du Canada.
Et en pleine préparation d’un stage, deux formateurs ont eu l’envie, le rêve, l’ambition, de faire venir Mr Thomas D’Ansembourg. S’en est suivi une demande qui a été reçue et entendue.
Aujourd’hui M. Thomas d’Ansembourg est présent en NC pour une série de conférences dont “Notre façon d’être adulte fait-elle sens et envie pour les jeunes” qui se déroulera le 15 Février 2023 à 18H30 au Conservatoire de Musique et de Danse de Nouvelle-Calédonie.
“La Communication NonViolente (CNV) est une approche que j’enseigne depuis bientôt 30 ans et que j’ai eu la chance d’apprendre avec son fondateur Marshall Bertram Rosenberg, un docteur en psychologie clinique, qui avait observé dans sa fonction au sein d’un grand hôpital psychiatrique que les gens font très vite l’objet d’étiquette, de cadre, de jugement. Ça ne permettait pas de rencontrer la vraie personne.
Et la difficulté pour rencontrer une vraie personne c’est d’arriver à la voir, sans la juger, sans la coller dans une case, à droite, à gauche.
Mais tout ça demande tout un travail de changement dans nos habitudes de fonctionnement, dans notre système de pensée.
Petit à petit, il a réalisé que les humains avaient les mêmes besoins fondamentaux, au-delà des besoins qui dépendent des codes, des modes ou des âges.
Tous ont les mêmes besoins fondamentaux.
Si on arrive à se comprendre à cet endroit-là alors on se rassemble.
Si on ne juge que l’extérieur de ce qu’on voit, on se déchire, on se dispute.
C’est ce que j’appelle la nappe phréatique de besoins communs. Nous descendons au niveau où nous allons comprendre nos besoins. Quelque soit les constructions de vie au-dessus qu’on soit une grande façade d’immeuble, une villa riche, une toute petite maison, une hutte, si on descend le puits qui permet à ses habitations de vivre, on découvrira l’existence d’une nappe phréatique d’eau commune à travers la planète.
L’idée, c’est d’essayer de descendre dans la nappe phréatique qui est commune entre nous pour débuter sur ce qui nous rassemble au lieu de s’empoigner sur ce qui nous divise.
Quand on parle de communication NonViolente, au début, l’appellation peut-être un peu réductrice.
Les gens pensent tout de suite “ça ne me concerne pas, je suis très gentil avec les autres”.
Mais ce qu’on apprend rapidement, c’est qu’il ne s’agit pas de coups et blessures, ou d’injure, mais d’une violence subtile que nous entretenons sur nous, sur les autres, sur les choses de la nature par nos systèmes de pensée.
Un exemple : qui ne se retrouve pas dans la difficulté de dire non dans la bonne mesure ? Nous sommes persuadés de devoir dire oui, parce que dire non est une véritable violence pour nous-même.
Qui ne trouve pas de difficulté à vivre dans le regard de l’autre ?
Qu’est-ce qu’on va dire de moi ?
Beaucoup de gens sont piégés par cette pression des pairs et le regard de l’autre.
Qui n’est pas en difficulté face à la colère qu’on retient et qui explose en violence ?
Qui est à l’aise avec la colère de l’autre ?
Voir quelqu’un en colère, ça fait peur.
Un parent qui voit son enfant en colère va l’envoyer se calmer dans sa chambre et ne va pas l’écouter.
Alors comment retrouver de la fluidité, de l’aisance mais aussi de la force et de la clarté dans notre façon de nous exprimer ?
Cette approche va bien au-delà d’un processus de communication. Il ne s’agit pas de dire et d’exprimer les choses mais de savoir les transmettre malgré les émotions.
Cela demande un ancrage en soi et une capacité à écouter l’autre avec bienveillance et empathie.
Cela demande de la force intérieure, dans la vraie personne que nous sommes, au delà du personnage qui est construit par la famille, les traditions, l’éducation, le système social et culturel, etc.
Ce personnage que nous sommes a pu nous aider à vivre mais ce même personnage peut nous étouffer et nous empêcher de vivre.
Nous avons besoin de savoir qui nous sommes profondément pour être guidé de l’intérieur. Voilà le principe de la CNV, apprendre à se connaître pour se respecter davantage et par cette connaissance et ce respect de soi, apporter écoute, compréhension et respect de l’autre.
Il est bien trop difficile de respecter l’être humain qui est devant si je ne respecte pas l’humain qui est dedans. C’est un travail d’intériorité citoyenne.
Je travaille à me connaître pour être un citoyen qui se met au monde de façon féconde et solidaire.
Avant j’étais avocat. Ce métier que je faisais dans l’idéal d’aider les gens à se mettre ensemble, m’a vite ramené à la conclusion qu’il mettait en avant des conflits et des tensions. Et j’en suis très sensible. Je me suis demandé comment faire quand il y a un conflit ou un différend pour apaiser ces tensions. Et à force d’observation, je me suis rendu compte en regardant ces conflits d’un peu plus près, qu’ils naissaient la plupart du temps de malentendus.
Et si j’observais le malentendu de plus près, je constate que le malentendu était composé de mal exprimé et de mal écouté.
Une personne n’avait pas exprimé clairement ce qu’elle aimerait, ce qu’elle souhaitait, ce qui rendait la vie plus agréable, donc elle avait exprimé des insultes, des jugements, des injures. Forcément, l’interlocuteur n’avait pas entendu des suggestions, des propositions, mais des jurons, des critiques, des reproches et des injures.
Donc soit il agit, soit il répond sur le même ton : mal exprimé, mal entendu, mal écouté.
Et j’ai mesuré qu’en tant qu’avocat, je mettais beaucoup d’énergie a tenté de trouver des solutions juridiques pour des enjeux qui relevaient surtout de la connaissance de soi, d’intelligence émotionnelle et d’empathie pour l’autre.
Et rien de ma formation d’avocat ne m’avait formé sur ces enjeux-là.
Pas un cours de connaissance de soi, pas un cours d’intelligence émotionnelle et pas un cours d’empathie.
J’ai alors mesuré ma pauvreté.
Ma formation d’avocat m’amène à dire à mon client que je suis là pour lui trouver une solution juridique et que les émotions, on s’en fiche.
Alors que lors d’un divorce, d’un partage d’héritiers ou d’un conflit de voisinage, il est possible de trouver des solutions plus émotionnelles et empathiques pour que tous les protagonistes s’entendent, sans aller sur des sanctions ou des solutions juridiques.
Je me suis alors intéressé à des activités avec des jeunes de la rue en tant que bénévole et j’ai compris que j’aime m’occuper de l’humain et j’ai envie d’aider l’humain à trouver du sens à ce qu’il fait, c’est comme ceci que je suis devenu petit à petit psychothérapeuthe. C’est le sens de ma vie.”
“Votre approche m’a particulièrement touchée quand j’ai entendu que vous étiez plusieurs personnes ici à non seulement vouloir vous former, mais aussi à devenir formateur.
Vous avez réalisé des stages à distance et vous mettez tellement d’énergie à faire intervenir des formateurs que je me suis dit que toute cette énergie devait se partager.
J’ai été touché de sentir votre détermination à vouloir enseigner à votre tour. Ça me tenait à cœur de vous encourager et de voir comment vous fonctionnez tout en contribuant à faire connaître cette approche dont je ne peux que constater les changements de vie chez beaucoup de personnes. Parce qu’elle permet vraiment de les aider à pivoter à l’intérieur d’eux-mêmes pour penser autrement, en agissant autrement.
J’ai vu des couples penser autrement et mieux se comprendre, des familles penser autrement et se poser pour mieux s’entendre, mieux s’écouter plutôt que de se bagarrer.
J’ai vu des équipes de travailleurs qui se sont mieux écoutés pour réaliser une vraie et belle collaboration.
En fait, je fais un peu ma part de colibris.”
C’est plutôt l’inverse.
C’est grâce à la CNV que je me suis autorisé à m’envisager comme parent.
Avant j’avais trop peur de reproduire des schémas que j’avais pu vivre en tant qu’enfant. J’avais de bons parents présents et attentifs, mais quand même, des schémas d’éducation assez traditionnels qui ne me convenaient pas et je ne me sentais pas à l’aise d’être un jour parent. Par contre, à partir du moment où j’ai appris la communication NonViolente, j’ai mesuré qu’on pouvait fonctionner tout autrement et indiquer des valeurs, respecter des limites, choisir des priorités autrement que selon l’ancien régime.
J’irai même plus loin en disant que c’est la connaissance de soi, que permet la CNV, qui m’a permis de me mettre en couple avec Valérie avec qui je suis marié depuis plus de 25 ans maintenant.
Avant j’avais trop peur de l’engagement affectif.
J’avais peur de me perdre dans une relation, de ne plus oser être moi-même et je sais que c’est un enjeu de beaucoup de couples : comment être pleinement soi-même dans son couple ?
Beaucoup de gens ont peur de ça et bien souvent les couples cassent parce que l’un ou l’autre ne sent pas qu’il s’autorise à être pleinement lui-même et qu’il est limité.
J’avais peur de ça.
La CNV m’a permis de me sentir à l’aise et d’être moi-même dans le respect de l’autre et de trouver une relation que je trouve très joyeuse et profonde avec Valérie depuis 25 ans (sourire).
J’aimerais les aider à accepter que nous avons besoin de nous parler pour nous comprendre, de nous parler dans un climat de confiance et d’écoute mutuelle. Et se parler pour se comprendre ne veut pas dire qu’on est d’accord, ça veut surtout dire qu’on crée un climat ou le “nous” l’emporte. Ce n’est pas je te dit de faire ça et tu m’obéis.
Ou je te laisse tout faire et tu deviens un enfant roi.
Ce n’est plus du tout ça.
On se parle pour ressentir le plaisir qu’il y a être ensemble même si on n’est pas d’accord, et ça crée du respect , ça crée de l’estime, ça crée de la confiance. On peut donc abandonner les vieilles stratégies au fond manipulatrice de la punition/récompense à l’image de la carotte et du bâton qui fonctionnent avec un âne. Nous avons besoin de nous rappeler que notre enfant n’est pas un âne, c’est un être humain intelligent et éveillé qui a besoin d’être compris, d’être rejoint, de recevoir de l’empathie, de l’encadrement également bien sûr et de la structure pour grandir.
Mais nous avons donc besoin de lâcher le vieux système de punition/récompense qui est un rapport de force.
J’imagine qu’un jour ces parents ont voulu conduire une voiture, se sont intéressés à la pratique d’un nouveau sport, ont voulu apprendre une nouvelle langue.
Ils ne se sont pas contentés d’être intéressés. Ils s’y sont impliqués.
Ils ont appris à conduire une voiture, ils maîtrisent un nouveau sport, ils pratiquent une nouvelle langue. Et si on leur demande comment ils ont fait ça, ils vont répondre : je l’ai décidé, j’ai ouvert des manuels, j’ai pris des cours, j’étais un peu coaché, j’ai eu un prof. Mais surtout : j’ai beaucoup pratiqué, j’ai fait des essais, des erreurs, j’en ai eu marre, mais petit à petit j’ai intégré la conduite d’une voiture, la pratique d’une nouvelle langue et celle de ce nouveau sport.
C’est un processus d’apprentissage, la CNV c’est la même chose. Si vous avez envie d’avoir de meilleures relations avec votre conjoint et avec vos enfants, apprenez l’art de la relation humaine. La plupart du temps on ne l’a pas appris et j’en sais quelque chose, ayant fait un premier métier de relation humaine, qu’est le métier d’avocat, je n’ai pas reçu une seule formation sur la relation humaine. Pas une clé de connaissance de soi. J’ai juste appris le droit. Alors que mon métier était d’aider les gens à se réentendre, à retrouver du lien lors des conflits. Nous avons donc absolument besoin d’instaurer une attention aux relations humaines et à cet apprentissage.
C’est un enjeu extrêmement courant. Beaucoup de parents ont du mal avec la colère des enfants, avec le dépit, parfois la rage, la peur ou la perte de sens.
Et assez souvent c’est le reflet de leurs propres difficultés à accueillir leur propre peur, leur propre colère, leur propre moment de dépit.
Et là, les apprentissages de la connaissance de soi sont vraiment des clés.
Comment être à l’écoute de la peur de l’autre si j’écoute jamais ma peur et que je ne veux même pas la voir ?
Comment bien comprendre la colère de l’autre si je m’interdis moi-même d’être en colère et que je blinde tout à l’intérieur?
Comment accueillir le moment de désarroi de mon enfant, si moi-même je ne veux jamais me voir dans le désarroi et que je prétends que tout va bien ?
De nouveau on va rejoindre cet enjeu essentiel d’apprendre à se connaître et à accueillir toutes les parties de soi, toutes ces facettes de soi, toutes les saisons du cœur, de sorte à être à l’aise. Je sais qu’un être humain peut vivre de la solitude et du désarroi, et que ce sont des ingrédients dans la vie d’un homme. Ce ne sont pas des accidents, je les écoute, je les traverse. J’en tire l’enseignement pour retrouver petit à petit la confiance donc je sais servir cette même écoute à mon ado, à mon enfant qui passe par ces moments-là.
Ce que j’aimerai dire aux parents, c’est que tout le temps que vous consacrez à vous connaître va être offert comme un cadeau précieux à vos enfants.
Exactement comme si vous preniez du temps de méditation ou de Yoga. Ça vous rend zen, ça vous pacifie, ça vous aligne, c’est aussi offert en retour dans la qualité de lien que vous aurez avec vos proches.
Mais toutes ces pratiques, aussi bénéfiques soient-elles, ne nous aident pas à connaître nos émotions. Souvent, nous les mettons un peu de côté le temps d’une séance.
Donc je recommande de faire un travail sur la vie émotionnelle justement pour pouvoir être à l’aise avec les émotions des autres.
L’enjeu de la difficulté d’accueillir la colère est extrêmement courant.
Tant que nous ne sommes pas à l’aise avec notre colère, nous ne sommes pas à l’aise avec celle de nos enfants, donc nous l’envoyons dans sa chambre.
Arrête va dans ta chambre, tu reviendras lorsque tu seras calme
Et voilà comment est traitée l’information.
Au lieu de se dire : ok tu es en colère. Asseyons-nous et parlons-en.
Est-ce que tu es triste ?
Déçu ?
Découragé ?
Tu as besoin d’attention ?
On va aller à la rencontre du besoin. Mais ça ne tombe pas du ciel.
On ne crée pas d’un coup une relation empathique.
C’est une pratique qui s’instaure.
J’aime comparer cette approche avec du jardinage : on n’a pas de fruits et légumes du jour au lendemain.
Mais si on entretient le jardin, on les aura.
Mettez-vous à l’écoute de ce qui se cache derrière la colère d’un enfant.
Souvent se cache de la tristesse, de la peur, du ras-le-bol.
Plus je connais ça parce que je m’observe là-dedans et que je sais ce qu’il s’y passe (je suis moi-même en colère parce que je suis triste, que j’ai peur, que j’en ai ras le bol) plus j’ai des clés pour accompagner mon enfant.
S’il tape partout, je me mets à côté de lui.
Tu es en colère ?
OUIIII
Tu es vraiment fatigué ou découragé ?
OUIiii
Tu n’en peux plus ?
Oui.
Petit à petit, d’empathie en empathie, on arrive à un endroit où l’enfant va se sentir rejoint et va pouvoir se poser.
Et inversement.
Si face à un enfant en colère, je le congédie dans sa chambre en lui disant qu’il sera privé de dessert le tout sur un ton agressif, je jette de l’essence sur le feu et la colère se démultiplie.
Au fond ce n’est pas compliqué.
Mais ça demande de changer les systèmes de penser et d’être à l’aise.
L’enfant est en colère, il ne va pas bien, donc je m’occupe d’un humain qui ne va pas bien.
Un humain qui va bien n’est pas en colère. Je n’ai pas de jugement là-dessus.
Plus qu’apaisée. Hyper joyeuse.(rires)
J’ai 3 enfants, la plus grande a 24 ans, la cadette 19 ans.
On rit beaucoup.
Nos moments d’être ensemble sont des moments joyeux.
Les enfants sont heureux d’être à table. D’ailleurs, on a du mal à quitter la table tellement nous sommes contents d’être là. On est heureux d’être ensemble.
Ça ne veut pas dire qu’on ne met pas de cadre ou de structure, mais nous avons appris à le faire d’une façon qui soit fluide et compréhensible en indiquant systématiquement pourquoi on le fait et quel sens ça a.
Par exemple, chacune de mes filles m’a demandé : papa faut-il vraiment aller à l’école?
Ce à quoi j’ai répondu non il ne faut pas vraiment aller à l’école.
Ah je peux aller jouer au jardin.
Oui bien sûr.
Super !
Attends juste un instant. Si tu joues au jardin aujourd’hui, que feras-tu demain ?
Ben j’irai jouer au jardin.
D’accord, et après-demain ?
J’irai encore jouer au jardin
Et dans 15 ans ?
Ben je ne sais pas trop.
Voilà. Si on va à l’école c’est aussi pour savoir ce qu’on a envie de faire, connaître des pratiques, des approches qui vont nous permettre de créer un jour un métier qu’on aime bien, des activités et des projets.
On ne va pas à l’école parce qu’il faut, on va à l’école parce que ça permet une ouverture de conscience, une acquisition de connaissance et une capacité d’agir sur le monde.
C’est pour ça qu’on y va.
Mais on peut très bien aussi rester au jardin.(sourire)
Donnez du sens.
Ce n’est pas qu’il faut aller à l’école. C’est que ça a du sens d’aller à l’école.
Je comprends que les cours t’ennuient, que la discipline d’être assise t’incommode.
Je peux comprendre ça. Mais en même temps ça permet… Et on cherche ce que ça permet plutôt que ce que ça empêche.
Instaurez le dialogue.
Nous sommes conditionnés à prendre nos enfants par l’épaule et à les pousser à l’école parce qu’il le faut. C’est comme ça, on n’a pas le choix. Les parents contraignent. Et quand on contraint on obtient de la rébellion. Et on s’étonne qu’il y ait des tensions et qu’on se chamaille.
C’est le même principe dans la vie quotidienne.
Pour créer le nous, cela demande d’être attentif aux priorités des uns et des autres.
Tout le monde aime qu’une pièce soit bien rangée et que la cuisine soit en ordre mais pas forcément au même moment.
Et quand moi je n’ai pas besoin que ce soit fait maintenant, j’ai juste besoin que ce soit fait et que ce ne soit pas moi le parent qui le fasse, mais que chacun prenne sa part.
Donc je peux négocier en disant aux enfants: Êtes-vous d’accord de ranger la chambre ? Oui papa mais pas maintenant je finis mon devoir.
OK, du moment que tu le fais, ça me va.
Ça met de la souplesse.
Et il arrive souvent que l’enfant oublie qu’il a dit qu’il le ferait.(rires).
Et on revient dans la pièce et elle n’est pas plus rangée qu’avant (rires).
Alors ça demande parfois d’oser poser une limite et d’utiliser davantage de fermeté.
La colère non violente existe.
La colère n’est pas au service de la violence.
La colère qui doit être au service de la vie commune.
On peut dire stop.
Vous m’avez dit que vous rangeriez et vous n’avez pas rangé et ça me met en colère. Parce que j’aime bien que les engagements pris soient tenus. Qu’en pensez-vous ?
Inutile de hurler pour dire ça.
Souvent le fait de hurler vient du fait qu’on a accumulé beaucoup de frustration.
Beaucoup de familles vivent dans des cris.
D’ailleurs je vous recommande l’ouvrage Comment élever ses enfants sans élever la voix de Nathalie de Boisgrollier dont le titre est particulièrement évocateur.
J’ai pu le constater car je me mets rarement en colère parce que je pense donner des propositions assez claires.
Si je suis en colère, il suffit que je dise à mes enfants Stop les enfants. Je suis en colère et j’ai besoin qu’on se parle.
Je n’ai pas besoin de hurler.
Parce que c’est rare.
Donc ils pensent Si papa dit qu’il est en colère il faut qu’on l’écoute.
Beaucoup de parents ont pris l’habitude de hurler pour faire passer un message.
Mais ça veut dire qu’ils n’ont pas fait attention au nous. Et on se chamaille.
Remettons son attention à ce qui mobilise, encourage et à ce qui ouvre.
Ça change complètement la dynamique.
Tout à fait. La conférence “Notre façon d’être adulte fait-elle sens et envie pour les jeunes” s’adresse à toute personne, pas forcément des parents ou des éducateurs, mais à tous ceux qui ont envie de retrouver le sens de leur vie et ce qui les met en vie. Le mot envie est un plaisant jeu de mots. Qu’est ce qui me met en vie, qui me donne envie de vivre, de me lever le matin, d’aller vers les choses.
Ce sont des questions que malheureusement beaucoup d’humains ne se posent qu’en cas de crise.
Un jour, une dépression, un burn-out et on se pose des questions de base : qui suis-je, où cours-je et à quoi sers-je ?
Ce ne sont pas que des boutades, mais vraiment des enjeux de base de la vie.
Si on s’était posé ces questions plus tôt :
Qu’est-ce qui fait sens dans ma vie ?
Qu’est-ce que j’ai envie de vivre ?
Qui suis-je au fond ?
Quels sont mes talents ?
Qu’est-ce que je voudrais mettre au monde ?
Si nous nous étions posé ces questions anticipativement, on aurait évité beaucoup de frictions d’ego, de collisions et de voies sans issues dans lesquelles nous nous sommes engagés en croyant être sur la bonne voie alors que ce n’est pas le bon chemin.
Ce ne sont pas des enjeux de développement personnel, ce sont des enjeux de développement social, de vie commune, de vivre ensemble.
Dans la conférence je donne de nombreux exemples qui nous permettent de revisiter le modèle que nous avons au monde.
Forcément les jeunes regardent la génération qui les précède.
Est-ce qu’en nous voyant vivre notre vie d’adultes, ces jeunes ne se disent pas C’est super, c’est cohérent, c’est aligné, les valeurs sont belles, elles sont bien incarnées. J’ai envie d’être adulte dès que possible.
Malheureusement beaucoup de jeunes se disent que ces adultes sont fous, ils courent partout, ils parlent de valeurs mais je n’en vois aucune au quotidien, où sont-elles ?
Non je ne veux pas être adulte, je resterai adolescent.
Beaucoup de jeunes restent dans cet immobilisme au fond.
Il ne s’agit pas là de culpabiliser qui que ce soit.
Mais d’être responsabilisant.
N’acceptons plus la résignation, le ronronnement de ses habitudes.
Remettons-nous en questions à temps, vérifions que nous restons inspirés.
Parce que comment être inspirant si nous ne le sommes pas ?
Revisitons nos sources.
Pourquoi je fais ce que je fais et pas autre chose ?
Gardez cette fluidité, cet éveil.
Les enfants sont curieux par nature. Je n’ai jamais rencontré d’enfant paresseux.
Mais j’ai rencontré des enfants démotivés qui non pas l’impulsion autour d’eux de ce qui fait sens et envie.
Et donc, ça nous appartient à nous, adultes, de rester motivés par la vie, éveillés, contents d’être là, attentifs.
Je ne sais pas comment ça se vit en Nouvelle Calédonie mais dans les régions que je connais, la France, la Suisse, la Belgique, beaucoup de jeunes vivent de l’anxiété, la peur d’un risque d’effondrement, ou que le climat s’écroule complètement.
Je ne sais pas si c’est le cas ici, car la nature semble très présente.
Mais là-bas beaucoup de jeunes vivent ça, on constate des marches menées par les jeunes qui demandent aux adultes d’être responsables.
C’est une inversion considérable.
Mais c’est une indication que le modèle donné par les adultes n’est pas du tout inspirant pour les jeunes.
Donc l’idée c’est de se responsabiliser et d’être des acteurs de transitions.
Nous avons besoin de créer le monde que nous voulons avoir.
Mon livre se base sur l’expression de Gandhi que vous connaissez sans doute : soit le changement que tu veux voir dans le monde
Soyez vous-même le changement.
Interview réalisée par Laurina Fong, fondatrice de KIDS.nc et retranscrite par Cindy Johnston, rédactrice web SEO.